Vincent, théologien de l'incarnation
Billet de Jean-François Desclaux, c.m.
L’Évangile de Luc situe la naissance de Jésus dans un contexte international : la volonté de l’empereur de Rome de connaître sa population. Joseph, ayant ses origines à Bethléem, s’y rend avec Marie, son épouse. L’autorité politique veut dominer le monde et les personnes mais elle ne peut pas maîtriser la naissance d’un enfant et son avenir. Joseph et les siens ne trouvent, pour l’enfant qui naît, que l’hospitalité d’une mangeoire. Les cieux font irruption sur la terre des hommes avec le message de la grande nouvelle de la naissance de l’enfant. Le message n’est pas adressé aux puissants de Jérusalem, mais aux bergers vivant au milieu de leurs bêtes ; ils sont des êtres socialement et religieusement méprisés et inexistants, des êtres sans parole. Ils reçoivent, par l’ange, la nouvelle de la naissance du nouveau-né couché dans une mangeoire qui est « Sauveur, Christ et Seigneur, bonne nouvelle pour eux et tout le peuple ». La troupe céleste fait éclater la joie et la louange pour remercier Dieu qui aime tous les hommes. Les bergers décident d’aller voir et, ayant vu, ils deviennent les premiers missionnaires ; même Marie écoute et garde en son cœur leur message. Dans ce récit, seuls les anges et les bergers parlent et annoncent.
L’incarnation de Dieu en Jésus, pauvre parmi les pauvres, habite la vie et la pensée de saint Vincent de Paul. Nous avons, à sa suite, à poursuivre le message du récit de Noël : habiter la pauvreté et l’humilité de Dieu, aimer et aller chercher les sans-voix et faire de chaque personne rencontrée un être de joie et de parole comme le sont devenus les bergers.
Pour faire émerger des personnes pauvres et sans parole, Vincent emploie la pédagogie de « la question » aux Filles de la Charité : il propose de réfléchir durant l’oraison de la semaine au sujet de la prochaine conférence. Elle commencera par la prise de parole des Filles, des femmes sages, responsables, spirituelles, théologiennes devant qui Vincent s’émerveille. Il fait de même avec les pauvres. Vincent est un théologien de la création où Dieu crée par sa parole, de l’incarnation où la parole de Dieu s’incarne en Jésus, de la Trinité en qui est un dialogue constant.
Nous avons, à la suite de Jésus, à poursuivre le message du récit de Noël.