Frassati, le saint qui visait haut
Un siècle après sa mort, le bienheureux Pier Giorgio Frassati (1901-1925) sera canonisé en août 2025 à Rome. Ce jeune membre de la Société de Saint-Vincent-de-Paul à Turin continue à être un modèle pour les jeunes, et de nombreuses équipes locales portent son nom. Par Christian Dubié, président du CD du Cher

Frassati, un jeune de son temps
Au début du XXe siècle, l’Italie termine son unité. La Première Guerre mondiale s’annonce. L’Italie y sera aux côtés de la France et de l’Angleterre en 1915. Elle subira une cruelle défaite suivie d’une victoire mais avec son cortège de victimes. Pier Giorgio Frassati en a conscience. La suite ne sera pas meilleure : l’Italie, considérant qu’elle n’a pas récolté les dividendes de sa participation aux côtés des vainqueurs, va, la crise sociale aidant, basculer dans le fascisme. Comme dans les autres pays, l’industrialisation s’accompagne de conditions très dures pour les ouvriers.
Pier Giorgio et sa famille
Tout cela, Pier Giorgio Frassati le sait, même s’il appartient à une famille privilégiée. Son père, très riche, va fonder le journal La Stampa, un des deux quotidiens les plus lus. Il sera, par la suite, ambassadeur en Allemagne et sénateur. Sa mère est une artiste reconnue. Mais ses parents ne s’entendent pas. Ce sera, sans doute, le plus grand drame de sa vie, qui lui fera renoncer à la jeune fille qu’il aime pour ne pas aggraver leur mésentente.
Son père voudra faire de lui son héritier à la tête du journal mais s’apercevra vite que telle n’est pas sa vocation. Pier Giorgio veut être ingénieur pour être aux côtés des ouvriers. Bien que déçu, son père reconnaîtra ses qualités, lui manifestera son soutien et fera vivre sa mémoire jusqu’à la fin de sa vie. Sa mère ne lui rendra pas l’affection qu’il a pour elle. Dans ce contexte, Pier Giorgio et sa sœur seront toujours très proches.
Un bénévole de 17 ans
Très tôt, il a le sens de la charité, allant jusqu’à se dépouiller lui-même au profit des pauvres. À 17 ans, il rejoint la Société de Saint-Vincent-de-Paul et fait partie de plusieurs équipes locales (Conférences). Paraphrasant la Règle (charte de bonne conduite), on peut dire « qu’aucune œuvre de charité ne lui est étrangère ». Il nourrit, il achète des médicaments, il déménage des personnes expulsées, il procure du travail grâce à son père et va même jusqu’à racheter un bijou au « mont-de-piété » pour le rendre à sa propriétaire. Il fait tout avec son argent personnel. Il fait tout aussi dans l’humilité au point que certaines personnes ne connaîtront sa filiation qu’au moment de ses funérailles.
Cette charité est indissociable de la foi qu’il a dès son plus jeune âge. Il reçoit une éducation salésienne. Sa plus grande joie sera de communier tous les jours ; il sera aussi tertiaire dominicain sous le nom de Frère Jérôme. Il envisage la prêtrise mais y renonce car les prêtres italiens ne participent pas aux œuvres de charité.
Pier-Giorgio, un sportif inspiré
Trois choses sont étroitement liées à la charité de Pier Giorgio : le catholicisme, l’amitié et le sport. Il adhère à plusieurs associations de jeunes catholiques. Il crée avec certains, garçons et filles, « la compagnie des types louches » dans laquelle ils seront très unis. Chacun y reçoit un surnom, le sien est « Robespierre ». Cette association les réunira dans le sport et notamment l’alpinisme, sa passion.
Pier Giorgio redoute l’âge adulte avec la fin de ses études. Au moment de sa mort, il préparait ses derniers examens. Son diplôme d’ingénieur lui sera délivré à titre posthume le 6 avril 2001, jour où il aurait eu cent ans.
S’il craignait la mort physique, il l’envisageait sereinement comme un passage vers un bonheur parfait. Il affronta sa maladie dans une quasi-indifférence familiale, sa grand-mère étant mourante au même moment.
À l’occasion de la canonisation de Pier Giorgio Frassati, le 3 août 2025 à Rome, la Société de Saint-Vincent-de-Paul propose une aide financière aux jeunes qui souhaiteraient participer.

TÉMOIGNAGE
« Pier Giorgio Frassati, est un exemple pour notre équipe »
« Pier Giorgio Frassati était un jeune très engagé dans sa vie spirituelle. C’est un exemple à suivre pour chaque membre de notre équipe locale (Conférence) par sa vie de foi et sa charité vivante. Ce qui anime notre équipe est « l’amour du prochain ». C’est la raison pour laquelle nous réalisons des maraudes dans Bordeaux à l’image de Pier Giorgio qui rendait visite aux pauvres de la ville de Turin. Sa vie spirituelle est inspirante car sa vie de foi nourrissait sa vie caritative et inversement. De même, nous accordons également beaucoup d’importance à prier avant d’aller visiter les pauvres. C’est un moment pour confier au Seigneur les personnes que l’on va rencontrer et prier pour que nous soyons ouverts à l’amour de notre prochain. Lors de ces rencontres, parfois on se rend compte que le témoignage des pauvres nous évangélise et nous fortifie dans la foi. En effet, nombreux sont ceux qui nous disent : « Que Dieu vous bénisse ». Comme disait Pier Giorgio, il y a une lumière chez les pauvres que nous n’avons pas.
Par ailleurs, comme Pier Giorgio et ses amis, nous partageons des beaux moments de fraternité entre bénévoles (Vincentiens) à travers nos réunions mensuelles et les événements dédiés aux jeunes. La vie fraternelle est importante pour nous, pour nous nourrir spirituellement et échanger sur ce que l’on vit pendant les maraudes. Ce qui me marque particulièrement, c’est l’engagement total de Pier Giorgio pour relever les pauvres et leur redonner leur dignité. Ainsi, nous organisons également des repas partagés avec les personnes rencontrées pour les grandes fêtes à Noël et Pâques. « Verso l’alto » en italien qui signifie “Vers le haut” est une phrase que l’on se répète souvent pour s’encourager. C’était la phrase favorite de Pier Giorgio. Elle signifie qu’il faut être à la recherche du royaume des cieux, avoir le désir de sanctifier nos actions pour se rapprocher du Seigneur. »
Mario Manama, président de la Conférence (équipe locale) jeunes de Bordeaux
