Le Prévost, un acteur peu connu des débuts de la Société de Saint-Vincent-de-Paul
Le Prévost est surtout attaché à la création des Religieux de Saint-Vincent-de-Paul, destinés à compléter l’œuvre de la Société de Saint-Vincent-de-Paul. Mais il en fut aussi un membre important. Ozanam Magazine revient sur son histoire.

Jean-Léon Le Prévost naît en 1803 en Normandie. Son père a une petite entreprise. Sa mère meurt alors qu’il n’a qu’un an. Il est élevé par une belle-mère aimante et fait ses études dans des établissements laïcs. Son père meurt ruiné en 1822 et le jeune homme doit gagner sa vie comme professeur en Alsace et à Lisieux. C’est là qu’il rencontre des prêtres qui lui font retrouver la foi et le désir de servir Dieu.
Donner du sens à sa foi
En 1825, il est engagé, à Paris, comme secrétaire de Mgr Frayssinous, premier aumônier du Roi. Il devient, par la suite, fonctionnaire au ministère des cultes où il reste vingt ans. C’est à partir de là, lors de sa rencontre avec Victor Pavie, jeune étudiant, que sa foi s’affermit et qu’il croise la route des jeunes catholiques qui sont à l’origine de la première Conférence de charité. Jean-Léon Le Prévost est comme tous ces jeunes, touché par la misère et, comme eux, il veut donner sens à sa foi.
En 1833, lors d’une rencontre avec Ozanam et ses compagnons dans un petit restaurant parisien, il est invité à faire partie de la Conférence de charité qu’ils viennent de créer. Il s’y montre très vite très actif dans l’instruction religieuse donnée aux jeunes détenus et, en général, auprès des pauvres.
Le patronage de Saint-Vincent-de-Paul
Dès le départ, les membres de la Conférence de charité vouent un culte à saint Vincent de Paul, dont les reliques ont été transférées le 25 avril 1830 depuis Notre-Dame jusqu’à la chapelle des Lazaristes, 95 rue de Sèvres. Sa fête, le 19 juillet, est célébrée par les confrères en 1833.
Mais c’est lors de la séance du 4 février 1834 que « M. Le Prévost, se faisant l’interprète de plusieurs membres, demanda que la conférence se mette sous le patronage de saint Vincent de Paul et célèbre sa fête ».
Jean-Léon Le Prévost, bien que n’étant pas tout à fait du même milieu et ayant un emploi modeste, a, sans nul doute, un ascendant sur les jeunes confrères, de par son âge – il a dix ans de plus, ce qui le place entre eux et Emmanuel Bailly –, et son engagement.
1835 : L’organisation
Le nombre des membres devient important. Non sans mal, la première Conférence doit se dédoubler : Le Prévost devient président de la deuxième Conférence. Des membres, éloignés de la Montagne Sainte-Geneviève, obtiennent de se réunir près de chez eux. Des Conférences se créent en province.
La nécessité d’un règlement se fait jour, dont la rédaction est confiée à François Lallier. Le 8 décembre 1835, lors d’une réunion plénière, M. Bailly donne lecture des considérations préalables au règlement « presque textuellement tirées des écrits de saint Vincent de Paul ».
« À la suite de cette lecture, M. Bailly, prenant désormais le titre de Président de la Société de Saint-Vincent-de-Paul, désigna pour vice-président Le Prévost, pour secrétaire général Brac de la Perrière, et pour trésorier Devaux. Ces quatre membres devaient former le Conseil de direction de la Société. »
En décembre 1840, en dépit des réserves d’Ozanam, qui le juge trop « clérical », lors de la création du Conseil Général, Le Prévost conserve sa charge de vice-président. Soutenu par M. Bailly, il avait pour lui d’être plus âgé et très dévoué.
Les frères de Saint-Vincent-de-Paul
Ce qui oppose Le Prévost et Ozanam, c’est la question du « patronage », issu de l’Œuvre des orphelins apprentis dont le premier avait pris la direction. Pour passer d’un patronage, simple placement de l’apprenti, à un « patronage par réunion », soutien permanent, il fallait du temps et les étudiants en manquaient. C’est l’origine, le 3 mars 1845, de la création des frères de Saint-Vincent-de-Paul.
En 1844, Le Prévost rencontre Clément Myonnet, un jeune commerçant, qui a fondé la Conférence d’Angers et qui, face aux problèmes sociaux, souhaite aller plus loin en créant une congrégation sur le modèle des Filles de la Charité. Celle-ci voit le jour dans la chapelle où se trouvent les reliques de saint Vincent de Paul. Y participe un troisième membre, ami de Le Prévost, jeune vincentien, Maurice Maignen. Le seul frère, Myonnet, prend la tête du patronage.
Ordonné prêtre en 1860
À cette époque, M. Le Prévost est encore marié. Il a épousé en 1834 une femme nerveusement malade, de 17 ans son aînée. Il finit par obtenir d’elle une séparation de corps, quitte son emploi et devient supérieur de la congrégation, qui verra le jour le 3 octobre 1846. Maignen le rejoint. Jean-Léon Le Prévost est ordonné prêtre le 22 décembre 1860, après le décès de son épouse. Il décède à Chaville le 30 octobre 1874 et est déclaré vénérable le 21 décembre 1998.
« L’amour passionné des pauvres et de la vérité fut l’âme et la gloire
de sa vie publique »
« Très chers et bien-aimés frères,
Jean-Léon Le Prévost, 26 août 1847
Entrons dans ce mouvement, chers amis, sans hâte comme sans mollesse, suivant le pas de Dieu ; avec Lui, nous irons sûrement et nous atteindrons notre fin. Ne sentez-vous pas comme moi dans votre cœur une certaine puissance, une sorte d’aspiration d’avenir, un grand désir, une grande espérance ? Eh bien, le signe et la force de notre mission est là ; Dieu a mis en nous le désir pour que nous priions, l’espérance, pour que nous agissions ; prions de tout le souffle de notre âme, travaillons avec un saint courage, et marchons en confiance, car nous sommes dans la voie ; chaque pas nous porte au but…. »
