Amaru Cazenave : « Communiquer, c’est se mettre au service de son public »

Spécialiste de l’audiovisuel depuis 2004, passé par TF1, Amaru Cazenave a fondé l’agence de communication audiovisuelle Revival Production. Il travaille aussi à la création de nouveaux formats, comme Les Lueurs. Propos recueillis par Sophie le Pivain.

La commu­ni­ca­tion paraît parfois une perte de temps, préten­tieuse, au détri­ment de l’ac­tion de terrain. Qu’en pensez-vous ?

Il faut chan­ger de point de vue.Contrai­re­ment à ce que l’on peut penser, commu­niquer n’est pas se mettre en avant. C’est plutôt se mettre à la place du public auquel on veut s’adres­ser. Moi-même, je connais le sens et la beauté de ce que je fais. Mais le public, lui, ne le sait pas. Je dois alors me poser cette ques­tion : quelles sont les valeurs que j’ai envie de trans­mettre et à qui ? La commu­ni­ca­tion devient donc un service. Cette notion m’est appa­rue il y a quelques années : quand je conçois des vidéos, je ne le fais pas pour moi, ni même pour le client qui me les a comman­dées, elles appar­tiennent au public auquel je m’adresse. C’est lui que je veux rejoindre et c’est à lui que j’es­saye d’ap­por­ter quelque chose. Chan­ger de point de vue pour adop­ter celui de son public demande un vrai effort. Quand une campagne ne fonc­tionne pas, c’est souvent là que l’on s’est trompé. Mais, au-delà de cela, il est impor­tant de prendre conscience que la commu­ni­ca­tion est abso­lu­ment néces­saire. Même les événe­ments les plus atten­dus, les plus espé­rés et les plus commen­tés, sont entou­rés d’une forte campagne de commu­ni­ca­tion. Alors, si l’on veut se faire connaître, combien faut-il commu­niquer quand on est une asso­cia­tion moins célèbre !

Par quoi faut-il commen­cer ?

La première ques­tion à se poser est celle de sa cible : le public auquel je veux m’adres­ser ? Cette cible doit être précise, car on ne peut pas parler à tout le monde : une Asso­cia­tion spécia­li­sée n’est pas McDo­nald ou Nike ! C’est ce qui permet ensuite de défi­nir une stra­té­gie qui puisse rejoindre son public là où il est. On se rassure parfois en se disant : « c’est bon, on a commu­niqué », quand on a posté des messages sur Linke­dIn, ou passé quelques coups de fil. Quand cela ne donne rien, c’est souvent un problème de vision : on s’est engouf­fré dans les détails sans réflé­chir à une stra­té­gie plus globale. Commu­niquer demande du travail et de l’in­ves­tis­se­ment. Un autre écueil est de vouloir se rassu­rer avec les chiffres, alors qu’on a manqué sa cible, comme cette insti­tu­tion chré­tienne avec qui j’ai travaillé, et qui cher­chait à atteindre un public non chré­tien. Les vidéos prépa­rées obte­naient quelques vues mais rien d’ex­tra­or­di­naire. Deux choix étaient possibles : inves­tir dans de la publi­cité dans un endroit où l’on savait que l’on touche­rait un public assez large et non chré­tien, ou faire circu­ler les vidéos sur ses propres réseaux sociaux. Cette dernière option pouvait très bien marcher, et donner le senti­ment que cela fonc­tionne, mais elle ne touchait que des convain­cus, manquant le public qu’elle avait choisi de toucher. Il est impor­tant de toujours reve­nir à sa stra­té­gie fonda­men­tale, mais aussi d’ac­cep­ter les moments de désert ou les périodes de mou : les efforts finissent par porter des fruits. Il ne faut pas avoir peur de se remettre en ques­tion. On apprend aussi de ses échecs.

Quels sont aujour­d’hui les leviers de commu­ni­ca­tion incon­tour­nables pour se faire connaître ?

Les bons moyens sont ceux qui rejoignent leur public. Tout le monde a crié à la mort de la télé­vi­sion lors de l’avè­ne­ment de Youtube, et elle est toujours là. On a dit que les réseaux sociaux, en permet­tant de cibler très préci­sé­ment leur public et de collec­ter de nombreuses données, allaient deve­nir essen­tiels dans la commu­ni­ca­tion, et c’est vrai. Mais ils ne sont pas le tout de la commu­ni­ca­tion. Les panneaux publi­ci­taires qui s’af­fichent en 4X3 dans les rues ont encore de beaux jours devant eux. Trac­ter sur les marchés reste une bonne idée pour échan­ger avec ceux que l’on rencontre.

Comment votre foi chré­tienne éclaire-t-elle votre vision de la commu­ni­ca­tion ?

Je pense souvent aux miracles de Jésus. Avant même d’an­non­cer le Royaume des Cieux, il s’adresse person­nel­le­ment à chaque personne qu’il rencontre, et répond à un besoin précis de celle-ci. De même, quand nous commu­niquons, nous pouvons nous deman­der ce que nous pouvons appor­ter aux personnes que nous cher­chons à rejoindre. Je pense aux campagnes pour les voca­tions sacer­do­tales que j’ai accom­pa­gnées. La cible est assez claire : des jeunes hommes de 18 à 35 ans, que l’on cherche à faire entrer dans une année de propé­deu­tique. Comme on ne peut pas se fixer cet objec­tif en une vidéo, nous avons frag­menté le message en plusieurs épisodes, conseillant tel livre pour avan­cer dans son discer­ne­ment voca­tion­nel ou invi­tant les jeunes en ques­tion­ne­ment à rencon­trer tel servi­ce… Nous nous sommes proposé de les aider à avan­cer dans leur chemi­ne­ment, dans un service donnant-donnant. C’est comme cela que je conçois la commu­ni­ca­tion.

Podcast Les Lueurs

Devenir bénévole

Nous avons toujours besoin de mains supplémentaires !