Communiquer : un cercle vertueux
Déployer des moyens pour assurer la visibilité d’une association n’est pas une évidence pour des bénévoles qui n’ont pas d’expertise en la matière. Il est pourtant essentiel de se faire connaître pour assurer la bonne marche de la structure, et donc pour se mettre au service des plus démunis. Enquête et témoignages de terrain.

Des chèques, des nouveaux bénévoles, des paires de chaussures… et même des pots de miel ! À chaque fois que des articles sortent dans la presse ou que l’un de ses posts fait le buzz sur les réseaux sociaux au sujet de l’équipe locale (Conférence) Saint-Vincent de-Paul de Niort (Deux-Sèvres), qu’elle préside, Geneviève Vilain-Lepage en constate immédiatement les retombées. « Et quand l’apiculteur nous a apporté des pots de sa production, nous lui avons proposé de faire une présentation au Café Sourire, ce qui a donné lieu à un nouvel article ! » se félicite-t-elle. Pour cette ancienne professionnelle de la communication, se faire connaître par tous les moyens possibles est un cercle vertueux : « On ne le fait pas pour se mettre en avant, mais pour pouvoir fonctionner correctement ! », estime-t-elle, assurant que « la communication n’est pas un gros mot ! »
Être connu pour être reconnu
De fait, contacter les médias ou poster des vidéos sur Instagram peut demander un effort, quand on s’est engagé dans une association pour être au contact des plus fragiles plutôt que des journalistes, qu’on est peu familier des réseaux sociaux, ou encore que, en tant que chrétien, on est embarrassé de se mettre en avant. Pourtant, « être connu et reconnu, pour une association, c’est le moyen pour que les personnes viennent à vous », abonde Pascale Dymowski, directrice de la communication de l’association Entourage. Créé en 2014, ce réseau de lutte contre l’exclusion sociale s’est récemment rendu très visible en apparaissant, grâce à un mécène, sur la voile du skipper Thomas Ruyant, lors du dernier Vendée Globe : « Nous travaillons pour être identifiés comme un acteur référent dans notre secteur, explique-t-elle. Au-delà de la notoriété, il en va aussi de la confiance que nous pouvons inspirer. Qui donnerait à une association dont il ne connaît rien ? » Elle le sait, sa jeune association ne pourrait pas envoyer des volontaires quêter avec des troncs dans la rue comme le fait la Croix-Rouge, plus connue. Voilà pourquoi, « avant toute campagne de dons, nous organisons une campagne de notoriété », explique-t-elle.
Si les associations ont toutes un service communication national, chargé de faire connaître leur cause et leur identité à grande échelle, elles savent qu’elles ne peuvent se passer de relais sur le terrain : « On voit bien que le contact local est important », affirme Méryl Le Breton, attachée de presse à la Fondation des Petits Frères des Pauvres, qui compte un chargé de communication dans chacune de ses régions, et s’appuie sur un réseau de volontaires prêts à témoigner. « Nous encourageons nos bénévoles à entretenir les contacts avec les journalistes et à raconter ce qu’ils vivent : les 100 ans d’un bénéficiaire de notre association ou le lancement d’une activité tricot. Ces événements intéressent les médias locaux et nous font connaître ! » Parfois, l’information fait boule de neige, comme le jour où Libération s’est rendu en reportage au café des seniors lancé par les Petits Frères des Pauvres dans la commune rurale de Prémery (Nièvre) après avoir découvert son existence dans la presse régionale, donnant ainsi un fort écho à l’association.

Qui donnerait à une association dont il ne connaît rien ?

S’appuyer sur les médias…
« Les médias locaux sont encore très lus, renchérit Manuel Rémond, président du Conseil départemental d’Ille-et-Vilaine, d’autant que les articles imprimés sont souvent repris sur les sites comme actu.fr ou maville.com. » Celui-ci soigne ses relations avec les journalistes de son territoire, ceux du diocèse au quotidien Ouest France ou à la radio Ici Armorique (ex-France Bleu) en les invitant à chaque événement et en leur envoyant ses vœux chaque année : « Cela demande un certain temps, mais c’est un travail qui paye, bien que pas forcément à l’instant T, et dont les résultats sont incontestables en termes de dons, de bénévoles, mais aussi de bénéficiaires qui n’auraient pas entendu parler de nous autrement. » Il s’est forgé peu à peu une bonne connaissance du fonctionnement des médias : « Les sachant très sollicités, je préfère leur envoyer un mail, sans oublier d’y laisser mon téléphone. Je fais toujours une présentation brève de mon sujet, mais pas trop non plus, parce qu’elle sera parfois reprise telle quelle. Et j’évite les périodes trop chargées en actualité comme les mois de mai/juin, mais aussi le mois d’août, qui touchera moins de monde… »
…et les étudiants
Dernièrement, Manuel a aussi accentué sa présence sur les réseaux sociaux, en relayant les publications de la presse sur les actualités de son secteur et en apprenant à faire des « stories » et des « reels » grâce à des jeunes de l’IUT de Rennes. Car les alternants ou les stagiaires en communication peuvent apporter aux associations une aide précieuse, souligne Geneviève Vilain-Lepage. Celle-ci fait souvent appel à des stagiaires de l’Université Catholique de l’Ouest, qui a une antenne à Niort : « Ils peuvent nous aider à préparer un événement, à créer des flyers ou des communiqués », explique-t-elle, précisant qu’elle demande toujours une validation à la direction du Conseil national de France (CNF). Il est important d’être très clair sur les besoins de l’équipe et les missions que l’on souhaite confier. Avant toute chose, la responsable fait découvrir à ces jeunes toutes les facettes de l’association, les faisant participer à une maraude ou à une distribution alimentaire : « En général, ils apprécient beaucoup et sont sensibles au fait d’agir pour une association caritative. » Si personne dans la Conférence n’a de compétences en communication, Geneviève Vilain-Lepage recommande de recruter des étudiants en 2e ou 3e année. Pour les régions éloignées d’une université, il est possible de prendre contact avec l’EFAP, l’École des nouveaux métiers de la communication, pour proposer un stage à l’un de ses étudiants.
« Les jeunes sont l’avenir du bénévolat », continue cette convaincue de la communication. C’est pourquoi, comme Manuel Rémond à Rennes, elle et son équipe se rendent aussi dans les écoles. Tous deux en ont fait l’expérience : témoigner auprès des jeunes publics se révèle une expérience riche et facile à mettre en œuvre, grâce aux outils fournis par l’équipe nationale. Forts de ces contacts, il n’est pas rare que les établissements proposent à leurs élèves d’aider la Société de Saint-Vincent-de-Paul par une collecte, à l’occasion du Carême ou pendant l’Avent. Des élèves qui se font ensuite les ambassadeurs de la cause de l’association. Geneviève comme Manuel en témoignent : ils ont vu un jour des parents se présenter spontanément pour proposer leur aide, émus par le message que leur avaient rapporté leurs enfants.

