Léon Cornudet : l’ami fidèle d’Ozanam
Peu connu, Léon Cornudet est un personnage clé, à la fois dans la vie de Frédéric Ozanam et dans les premières décennies de la Société de Saint-Vincent-de-Paul.
Léon Cornudet est né en 1808 dans la Loire où son père était négociant. Il est décédé à Paris en 1876. Il fait des études au collège Sainte-Barbe à Paris où il va nouer une amitié avec le comte Charles de Montalembert, qui durera toute leur vie. Leur correspondance de 1831 à 1870 a été publiée, faisant suite aux « Lettres à un ami de collège – 1827–1830 » rassemblées par Montalembert. Il va faire ensuite des études de droit. Il sera avocat puis magistrat avant d’entrer au Conseil d’État en 1836. Il y fera toute sa carrière. En 1839, il épouse Marie Chappotin de Saint-Laurent dont il aura cinq enfants parmi lesquels Élisabeth. Née en 1844 et amie de Marie Ozanam, elle sera la seule survivante à avoir connu Frédéric Ozanam, lorsqu’on envisage une procédure accélérée pour sa canonisation (1924).
Cornudet « est un de ces hommes auprès de qui il fait clair et chaud. »
Frédéric Ozanam d’après sa correspondance
Rencontres au salon
Les deux hommes se sont inévitablement rencontrés dans les salons du comte de Montalembert fréquentés par presque tous les membres de la future Conférence de Charité. Ce jeune et riche aristocrate, catholique libéral, tient salon à Paris le dimanche où il reçoit largement les étudiants et jeunes catholiques. Il deviendra, lui-même, membre de la Société de Saint-Vincent-de-Paul. Toutefois, l’amitié entre Léon Cornudet et Frédéric Ozanam ne s’affirmera qu’à partir des années 1840, lorsque le second reviendra à Paris.
Étonnamment, la correspondance publiée d’Ozanam ne comporte que quatre lettres (juin 1838, juin 1849, janvier et juillet 1853). Peut-être est-ce parce que, Ozanam étant à Paris, ils se voyaient souvent. Celle de juin 1838 est une demande d’intervention auprès de celui qui est alors chef de cabinet du ministre du Commerce, de l’Agriculture et des Travaux publics, en vue de l’obtention de la chaire de droit commercial, qui doit être créée à la Chambre de Commerce de Lyon. Les trois autres lettres sont plus personnelles. En revanche, le nom de Cornudet est cité de nombreuses fois, notamment pour des demandes d’interventions.
À partir de 1841, les couples Cornudet et Ozanam vont devenir amis et se rencontrer régulièrement. Lorsqu’il est seul, Frédéric va souvent dîner chez les Cornudet. Cette amitié ne faiblira pas après sa mort. Désigné par Frédéric lui-même comme tuteur de Marie, Léon Cornudet s’occupera de son éducation. Lallier est son parrain mais il n’habite pas Paris. Plus tard, Élisabeth Cornudet et Marie Ozanam seront compagnes d’études.
Cornudet et la SSVP
Léon Cornudet a été membre du Conseil Général dès sa création en 1840. En 1844, lorsque Emmanuel Bailly, premier président, décida de se retirer, il pressentit Cornudet pour être son successeur mais, à l’instar d’Ozanam, il refusa. Les deux hommes seront donc conjointement vice-présidents jusqu’en 1853. Léon Cornudet sera un important soutien pour Amélie Ozanam lors de la « polémique de 1856 », à laquelle celle-ci ne voulut pas prendre part. Cette polémique, lancée par le journal « L'Univers » visait à contester la prééminence d’Ozanam dans la création de la Société de Saint-Vincent-de-Paul.
Élection présidentielle et Second Empire
Au moment des « émeutes de juin », qui suivirent la révolution de 1848, c’est avec Cornudet et Bailly qu’Ozanam ira trouver l’archevêque de Paris pour lui demander de s’interposer. Monseigneur Affre sera tué le 27 juin, les combats s’arrêteront le lendemain.
Lors de l’élection présidentielle de 1848, Ozanam et Cornudet prendront une option divergente, le second, comme son ami Montalembert, soutenant le prince Louis Napoléon Bonaparte, quand Ozanam soutenait son adversaire. Leur brouille sera de courte durée. En 1852, Ozanam louera son ami, qui, rapporteur au Conseil d’État sur l’affaire de la confiscation des biens de la famille d’Orléans, se prononça contre et" fut immédiatement révoqué. Ozanam jugea cette attitude « digne d’un grand chrétien ».
Président du Vœu National
Par la suite, Cornudet sera réintégré dans ses fonctions et poursuivra sa carrière de haut fonctionnaire. Il sera, en outre, membre du Conseil Municipal de Paris (1857) et membre du conseil d’administration de deux grandes compagnies de chemin de fer.
Enfin, il sera président du Vœu National qui décida d’ériger à Paris, après la défaite de 1870, un sanctuaire dédié au Sacré-Cœur de Jésus pour « obtenir de son infinie miséricorde le pardon des fautes et faire cesser les malheurs de la France ».
Christian Dubié,
président du Conseil départemental du Cher