Bordeaux : À la table du Pain de l’amitié

Chaque déjeuner, sept jours sur sept, ce restaurant social, affilié à la Société de Saint-Vincent-de-Paul de la Gironde, propose un repas chaud aux plus démunis. Au Pain de l’amitié, chacun peut s’arrêter le temps d’un repas dans un local entièrement rénové il y a un an.
10H30
Dans la cour, Isabelle, une habituée du restaurant, discute avec Philippe, bénévole de longue date au Pain de l’amitié. Ici, elle dit se sentir bien. « Les bénévoles ont toujours un mot gentil. Et puis ils me connaissent bien », glisse-t-elle. À une heure du début du service, ces derniers sont bien occupés. Chacun jette un œil à la pendule accrochée à côté du portait de saint Vincent de Paul. Le Pain de l’amitié, fondé au cours de l’hiver 1984, est l’une des 34 associations spécialisées affiliées à la SSVP.
11H30
« Donne-nous un cœur joyeux pour le service, afin d’accueillir tous ceux qui vont venir aujourd’hui ». Plusieurs bénévoles se retrouvent pour un temps de prière. Après un signe de croix, chacun retourne à son poste. Derrière le comptoir, aujourd’hui, Elea et Mélanie, lycéennes en Bac Pro et stagiaires au Pain de l’Amitié. « On essaie d’avoir un sourire et une parole agréable pour chacun, explique Mélanie. Ça n’est pas toujours facile car certains sont très exigeants ! » Le restaurant, avec ses 56 places assises, fonctionne comme une cafétéria : un système qui permet de servir jusqu’à 180 repas par jour.
« J’ai mis ma fierté dans ma poche, confie-t-il. Heureusement que des lieux comme celui-ci existent. »
12H
Chacun paie son repas 1 euro. « C’est symbolique, reconnaît Jean-Philippe Gautriaud, directeur de l’association, mais cela rend leur dignité aux accueillis et c’est un pas vers la réinsertion ». Après plusieurs années passées dans un sous-sol, le Pain de l’amitié s’est installé, fin 2013, dans un bâtiment modulaire de 230m2. « Ici, on se sent vraiment bien ! », s’exclame Maurice, devant une fondue de poireaux à la lotte. « C’est toujours bon », complète son voisin de table, Amédée. Il y a six mois, ce jeune retraité a poussé la porte du restaurant. « J’ai mis ma fierté dans ma poche, confie-t-il. Heureusement que des lieux comme celui-ci existent. Quand on est au fond du trou, on pense qu’il n’y a personne pour vous tendre la main ».
13H
La fin du service a sonné. « Place au ménage ! », lance Marie-Pierre Guiet, Vincentienne. « J’aime se service, s’émeut celle qui vient ici chaque jeudi depuis sept ans. Le partage des taches est souple et le mélange des générations agréable. C’est fatiguant physiquement, mais quand on voit le sourire des gens, on sait qu’on est utile. »
14h
C’est au tour de l’épicerie solidaire du Pain de l’Amitié d’ouvrir ses portes. Chacun peut, tour à tour, y faire ses courses comme au supermarché. La structure accueille un public différent de celui du restaurant puisqu’il s’agit surtout de familles avec un logement. « Nous proposons des produits à un tarif qui représente 10 à 15 % du coût normal, précise Jean-Philippe Gautriaud. Un système qui permet de responsabiliser les accueillis car ils doivent établir un budget. » Yordanka, jeune Bulgare qui demande l’asile en France, vient ici tous les quinze jours pour approvisionner sa famille. « J’achète les fruits et les légumes. C’est moins cher. Sinon, on n’en mange jamais. »
Par Anna Latron. extrait d’Ozanam magazine n°212